Quant à la pierre précieuse, pas de trace.
-- Je l’ai examiné pouce par pouce, dit le pauvre Tom; elle n’est pas là; quelqu’un sera venu et aura remarqué le cercle, et l’aura prise. Rentrons à la maison, Jack, je me sens énervé, fatigué. Oh! y eut-il jamais une mauvaise chance pareille à la mienne.
Je faisais demi-tour pour partir, mais je jetai d’abord un dernier coup d’oeil sur l’escarpement.
Tom avait déjà fait une dizaine de pas.
-- Holà! criai-je, n’apercevez-vous aucun changement dans ce cercle depuis hier?
-- Que voulez-vous dire? demanda Tom.
-- Retrouvez-vous une certaine chose qui y était auparavant?
-- Le sel gemme? dit Tom.
-- Non, mais le petit corps saillant et arrondi dont nous nous sommes servi comme point d’appui. Je suppose que nous l’aurons descellé en manoeuvrant le levier. Regardons un peu de quoi il était fait.
En conséquence, nous cherchâmes parmi les cailloux détachés qui se trouvaient au pied de l’escarpement.
-- Nous y voilà, Jack. Nous avons réussi enfin. Nous voilà redevenus des hommes.
Je fis demi-tour et me trouvai en face de Tom qui rayonnait de joie et qui tenait à la main un petit morceau de roche noire.
Au premier coup d’oeil, on eut pris cela pour un éclat de la pierre, mais tout près de la base, il en sortait un objet que Tom me montrait avec enthousiasme.
On eut dit tout d’abord un oeil de verre, mais il y avait là, un éclat et une profondeur transparente que jamais ne donna aucune espèce de verre.
Cette fois, il n’y avait pas erreur, nous étions bien possesseurs d’une pierre précieuse de grande valeur.
Nous quittâmes donc la vallée d’un coeur léger, en emportant le «démon» qui y avait régné si longtemps.
Chapitre VII
Voilà la chose, Monsieur, je l’ai contée d’une façon trop prolixe, et je vous ai peut-être fatigué.
Vous le voyez, quand je me mets à parler de ces rudes temps d’autrefois, je crois revoir la petite cabane, le ruisseau qui coulait auprès, et la Brousse qui l’entourait, et je crois entendre encore la voix de ce brave Tom.
Il me reste peu de chose à ajouter.
Nous prospérâmes grâce à la pierre précieuse.
Tom Donahue, comme vous le savez, s’est établi ici, et il est bien connu dans la ville.
De mon côté j’ai réussi, je me livre à l’agriculture et à l’élevage des autruches en Afrique.
Nous avons donné au vieux Dick Wharton, de quoi s’établir pour son compte, et il est un de nos plus proches voisins.
Si jamais vous venez de notre côté, Monsieur, ne manquez pas de demander Jack Turnbull, propriétaire de la ferme de Sasassa.
NOTRE CAGNOTTE DU DERBY
Chapitre I
-- Bob! criai-je.
Pas de réponse.
-- Bob!
Un rapide crescendo de ronflements s’achève en un bâillement prolongé.
-- Réveillez-vous, Bob.
-- Que diable signifie tout ce vacarme? dit une voix toute endormie.
-- Il est bientôt l’heure du déjeuner, expliquai-je.
-- Que le diable emporte le déjeuner! dit l’esprit rebelle de son lit.
-- Et il y a une lettre, Bob, dis-je.
-- Est-ce que vous ne pouviez pas le dire plus tôt? Apportez-la tout de suite.
Et sur cette aimable invitation, j’entrai dans la chambre de mon frère et m’assis sur le bord de son lit.
-- Voici la chose: timbre poste de l’Inde, timbre de la poste de Brindisi. De qui cela peut-il venir?
-- Mêlez-vous de ce qui vous regarde, Trognon, dit mon frère, rejetant en arrière ses cheveux frisés en désordre.
Puis, après s’être frotté les yeux, il se mit en devoir de rompre le cachet.
Or, s’il est un sobriquet qui m’inspire une plus profonde aversion que les autres, c’est bien celui de «Trognon».
Une misérable bonne, impressionnée par les proportions entre ma figure ronde et grave et mes petites jambes piquetées de taches de rousseur, m’infligea ce sobriquet aux jours de mon enfance.
En réalité, je ne suis pas plus un «trognon» que n’importe quelle autre jeune fille de dix sept ans.
En la circonstance actuelle, je me dressai avec toute la dignité qu’inspire la colère, et je me préparais à bourrer de coups de traversin la tête de mon frère, quand je fus arrêtée par l’expression d’intérêt que marquait sa physionomie.
-- Vous ne devineriez jamais qui va venir, Nelly, dit-il. C’était un de vos amis autrefois.
-- Comment? De l’Inde? Ce n’est pas Jack Hawthorne?
-- Tout juste, dit Bob. Jack revient et va passer quelques jours chez nous. Il dit qu’il arrivera ici, presque en même temps que sa lettre. Ne vous mettez pas à danser comme cela. Vous ferez tomber les fusils ou vous causerez quelque autre accident. Tenez-vous tranquille comme une fille bien sage et rasseyez-vous.
Bob parlait avec toute l’autorité des vingt-deux étés qui avaient passé sur sa tête moutonnée.
Aussi je me calmai et repris ma première position.
-- Comme ce sera charmant! m’écriai-je; mais, Bob, la dernière fois qu’il était ici, ce n’était qu’un jeune garçon, et maintenant c’est un homme. Ce ne sera plus du tout le même Jack.
-- Oh! quant à cela, dit Bob, vous n’étiez alors qu’un bout de fille, une méchante gamine avec des boucles; tandis qu’à présent...